L’analyse technique est la plus ancienne méthode pratiquée pour analyser le comportement des marchés. Selon Murphy (1999), elle est définie comme étant l’étude de l’évolution des cours sur un marché, principalement sur la base de graphiques, dans le but de prévoir les futures tendances. Trois grandes catégories de méthodes peuvent être distinguées [1].
Premièrement, l’analyse technique traditionnelle est entièrement fondée sur l’étude des graphiques et le repérage de figures chartistes telles que le tête-épaules. Deuxièmement, l’analyse technique moderne est composée de méthodes plus ’quantitatives’, telles que les moyennes mobiles, les stochastiques,. . . La troisième catégorie, qualifiée de philosophique, a une ambition bien plus grande que la simple explication des phénomènes de marché. L’exemple le plus connu est certainement la célèbre théorie d’Elliott qui prétend que tout mouvement du marché peut s’analyser en huit phases, dont cinq d’impulsion et trois de correction [2].
Dans ce papier, nous nous intéressons à l’approche traditionnelle de l’analyse technique et plus particulièrement aux figures chartistes. Ces dernières ont fait l’objet de nombreuses investigations, notamment celles menées par Levy (1971), Osler (1998), Dempster and Jones (1998a), Chang and Osler (1999) et Lo, Mamaysky, andWang (2000). Ces études se sont axées principalement sur la profitabilité des règles de trading correspondante à chaque figure chartiste mais également au contenu informatif qui en découle.
La plupart de ces études aboutissent à la même conclusion, à savoir la non-profitabilité des stratégies ou règles de trading relatives aux figures chartistes. Cependant, Lo, Mamaysky, and Wang (2000) concluent que ces dernières présentent un contenu informationnel. La majorité de ces études utilisent des données journalières. Pour notre part, nous nous intéressons à l’utilisation de ces figures chartistes sur des données intra-journalières. Nous pensons que ces figures puissent être sensibles aux fréquences d’observations (5, 15, 30 et 60 minutes), types de prix (acheteur, vendeur ou moyen) et aux méthodes de détection des figures chartistes.
Dans cette étude, nous analysons la sensibilité des figures chartistes à ces différents facteurs en termes de prédictibilité mais également de profitabilité. Nous comparons, en effet, les résultats obtenus selon ces deux critères pour deux méthodes de détection des figures. La première méthode utilise uniquement les cours dits de clôture de chaque intervalle de temps, càd les cours déduits aux extrémités des intervalles, tandis que la seconde utilise les cours les plus hauts et les plus bas de chaque intervalle.
Nos résultats montrent qu’en général les figures chartistes sont sensibles aux fréquences d’observations, type de cours et à la méthode de détection. Toutes les figures chartistes sont profitables, ce qui conforte l’idée selon laquelle les traders utilisent ce type d’approche pour opérer sur le marché des changes euro-dollar.
Les figures en triangle semblent être les plus profitables mais également celles possédant le meilleur pouvoir prédictif. Nous concluons également à l’intérêt de l’utilisation des cours les plus hauts et les plus bas (la deuxième méthode) car cette méthode procure un profit significativement supérieur à celui obtenu quand seuls les cours de clôture (la première méthode) sont utilisés. Cependant, en terme de profit ajusté au risque, la deuxième méthode est préférée à la première seulement lorsqu’il s’agit des cours MID.
Les cours les plus hauts et les plus bas auraient par conséquent un contenu informationnel profitable. Nous considérons l’approche tenant compte des cours les plus hauts et les plus bas comme étant la plus profitable. Le choix de la fréquence d’observations dépend principalement de l’horizon d’intervention des traders: l’utilisation d’une fréquence d’observations élevées procure des petits profits mais limite le temps pendant lequel la position du trader est ouverte, tandis que l’utilisation d’une fréquence plus faible augmente le profit mais entraîne une durée plus longue de détention d’une position. Ce papier comporte en plus de l’introduction, six sections.
La section 2 est consacrée à la présentation des études qui se sont focalisées sur l’analyse technique en général et les figures chartistes en particulier. La section suivante présente la méthodologie adoptée pour la reconnaissance des différentes figures chartistes, selon la méthode de détection choisie et selon la définition de chaque figure. Cette section présente également les deux critères qui vont servir lors de l’analyse empirique, à savoir le critère de prédictibilité et celui de profitabilité. La section 4 présente la modélisation des méthodes adoptées pour détecter les figures chartistes. La section 5 introduit les données utilisées dans l’étude ainsi que leur traitement préalable. Les résultats des estimations et les commentaires sont donnés dans la section 6. Enfin, nous concluons dans la section 7.
1. Cette distinction provient de Béchu and Bertrand (1999).
2. Une phase d’impulsion est une phase de hausse et une phase de correction est une phase de baisse.
Prof. Walid Ben Omrane et Hervé Van Oppens
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